L'Eurofighter

En 1986, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne (après le départ de la France en 1985) fondèrent le consortium Eurofighter chargé de développer cet appareil, le partage de la production étant lié aux intentions d'achats, à savoir 37,5 % pour British Aerospace, 30 % pour DASA, 19,5 % pour Aliena et 13 % pour CASA. Le démonstrateur EAP (Experimental Aircraft Program) a effectué des essais en vol de 1986 à 1991 pour valider les technologies applicables à l'Eurofighter. Premier vol : le 27 mars 1994.

 

D'une technologie avancée, l'EF2000 est doté de commandes de vol électriques numériques quadruplées conçues, non sans mal, par DASA. En effet, des problèmes de logiciels ont sévèrement limité le domaine de vol pendant plusieurs années mais aujourd'hui, ils sont progressivements résolus. L'avion de série sera doté de deux réacteurs à double-flux Eurojet EJ200-3A de 6,1 t de poussée unitaire à sec et de 9,2 t avec postcombustion. Le rapport poussée/poids de 1,2 t permet à l'avion de voler en supercroisière (supersonique sans utiliser la postcombustion) sans emports extérieurs, ce que de récents vols d'essais ont démontré. On envisage à l'avenir d'installer un système de tuyères mobiles permettant la déviation du flux des réacteurs pour augmenter sa manoeuvrabilité.
Le système d'armes s'articule autour du radar multifonctions GEC-Marconi ECR-90. Doté d'une antenne à balayage mécanique, il aurait une portée de 130 km et il serait capable de traiter simultanément douze cibles et d'en engager huit. Ses modes air-sol comprennet l'évitement d'obstacles, la cartographie et l'attaque d'objectifs terrestres ou navals.
Son radar actuel n'est pas aussi performant que ceux qui équipent les derniers appareils comme le F-22 ou le Rafale mais un nouveau projet à dores et déjà été lancé en 1996 afin de le doter d'un radar de pointe. L'EF2000 est également équipé d'un système de poursuite infrarouge Eurofirst PIRATE utilisable sur des cibles aériennes ou terrestres. De nuit, il fournit une image IR du terrain survolé. Dans le cockpit, le pilote dispose d'un viseur tête-haute grand champs GEC-Marconi, de trois écrans multifonctions en couleurs, d'un viseur de casque et d'une commande vocale. La détection des menaces et l'autoprotection sera gérée par le système EuroDASS (Defensive Aid Sub-System). Des leurres tractés pourront être employés en option.

 

Biréacteur bisonique, l'EF-2000 est conçu comme un intercepteur capable d'effectuer des manœuvres serrées tant en vol supersonique à haute altitude qu'à vitesse subsonique au niveau de la mer. C'est pourquoi il bénéficie d'une configuration aérodynamique de type canard avec plans pilotis. Alors que ces derniers, comme les ailerons, sont construits en titane, le reste de la cellule (soit 70 %) fait appel aux matériaux composites en formage superplastique (fibre de carbone pour la voilure et dérive fuselage) et aux alliages légers (aluminium-lithium pour les becs de bord d'attaque, emplanture de voilure et carénages ECM). Résultat: un gain de masse d'environ 30 % par rapport à un appareil de construction classique.

La participation de la RAF imposait comme priorités très importantes d'une part la possibilité de pouvoir opérer à partir de bases sommaires mais aussi doter le EF-2000 d'une capacité d'attaque au sol. Son intérêt à l'exportation s'en est vu largement amélioré surtout avec le coût extrêmement élevé du F-22 Américain.

S'inscrivant dans le cadre de la guerre froide, l'EF-2000 devait alors correspondre à une menace aérienne globale et bien définie. Ses constructeurs visaient deux objectifs principaux: contrer les toutes dernières versions des chasseurs MIG-29 Fulcrum et Su-27 Flanker; déjouer les défenses sol-air de I'Union Soviétique. Mais la chute du mur de Berlin et la déliquescence des pays de 1'ex-URSS bouleversent le programme européen. Il faut le revoir de fond en comble. Pendant que ses concepteurs se mettent à nouveau au travail, ses détracteurs affûtent leurs arguments. Considéré comme obsolète et dépassé avant même que le premier exemplaire n'ait pu décoller, l'EFA devient une cible rêvée. On lui reproche de ne pas correspondre aux nouvelles donnes du combat aérien, et, surtout, de ne pas répondre aux critères de furtivité actuellement en vogue.

Ne se cachant pas d'être le maître d'œuvre de 1'avion de chasse européen, la Grande-Bretagne tient bon. Face aux critiques, et malgré les réticences d'une Allemagne entre-temps réunifiée. Confrontée à une réduction drastique de son budget de la défense, cette dernière tente, sous la houlette du chancelier Helmut Kohl et de son ministre de la Défense, Volker Rühe, de se défaire de 1'encombrant programme. Estimant y perdre quelque dix millions de francs par jour, Bonn préférerait investir dans la construction d'un avion de combat européen moins coûteux. Elle tentera bien de lancer une version allégée monoréacteur baptisée " Eurofighter Light ". Sans succès.

L'abandon du projet pourrait avoir des conséquences désastreuses pour l'Italie et l'Espagne où l'EFA représente l'avenir d'une industrie.

Jusqu'à ce qu'il lance lui-même un pavé dans la mare on annonçant officiellement, au cours du Salon de Farnborough de septembre 1996, le lancement de la production de I'Eurofighter pour la Royal Air Force. Ultime subterfuge pour forcer le pas d'une Allemagne réticente, et, dans une moindre mesure, décider les politiciens d'une Espagne hésitante et d'une Italie dubitative.

 

Les premières livraisons devraient avoir lieu en 2001, suivies d'une mise en service opérationnelle en 2003.